La vie, est comme un immense casse-tête. À coup d’essai erreur, on tente aléatoirement d’emboiter les pièces les unes dans les autres pour en faire un tout. Celui de Deptford Goth, est magnifique dans son exubérance.

Découverte musicale #12 : Deptford Goth

Le réveil fût brutal. Dans des draps inconnus, mascara coulé, cheveux ébouriffés, haut le cœur d’une veille arrosée. Il était tôt. Je devais absolument me réveiller pour prendre un cliché dehors. C’était pour Les Matins Infidèles, un concours du Musée National des Beaux-Arts qui consiste à faire une photographie à précisément 7h42 tous les matins pendant 10 jours et à la publier au même moment sur Instagram.

À mon retour chez lui, à l’apogée de la trashitude, je ne rêvais que de retourner chez moi, prendre une douche, et dormir un peu avant d’aller au boulot. Habillée, fin prête à partir, pas de trace de mes clés. Après avoir fouillé dans les moindres recoins, déplacé tous les meubles, remué cent fois mes lents méninges (toujours intoxiqués), rien. Mes clés si précieuses s’étaient volatilisées.

-«Elles doivent être au resto ou au Cercle. On va appeler c’est certain qu’elles sont là.»

-(Totalement angoissée) «Oui ça doit être ça… Je dois les avoir oublié là, c’est sûr.»

Après quelques coups de téléphone, personne n’avait retrouvé mes clés. Mon monde s’écroulait. Voiture immobile et impossible de rentrer chez moi. Que faire?!

À grands coups de “Il y a une solution à tout, on va les retrouver”, “inquiète toi pas, ça me fait plaisir de t’aider», “t’es belle pareille” (malgré l’état le plus lamentable de ma vie), décidément, j’avais affaire à un chic type.

Nous avons donc passé au peigne fin les rues où nous avons déambulé la veille. Nous sommes retournés aux endroits qui ont été les témoins des premiers balbutiements de ma déchéance…. Encore rien.

 «La vie, c’est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l’équilibre»                    -Einstein

J’étais désemparée. Mais soudain, j’ai eu un flash. J’ai un double de ma clé de voiture quelque part chez moi. Je l’avais confié à mon ancienne colocataire. C’était déjà un grand pas dans la bonne direction. Comme si les coins et les bords étaient soudainement assemblées, il ne restait plus rien que les pièces du remplissage à emboîter.

-«Et si j’appelais au boulot pour qu’ils m’activent une nouvelle puce. Et si je sonnais chez mes voisins pour qu’ils m’ouvrent la porte de l’immeuble, je pourrais du même coup emprunter leur clé pour en faire un double. Ensuite je pourrais appeler un serrurier pour qu’il déverrouille mon condo et me fasse une nouvelle clé. Je pourrais ensuite récupérer ce fameux double de voiture qui traîne quelque part et retourner chercher mon auto garée depuis la veille dans un stationnement 1 heure.”

Le tour était joué.

Après plusieurs heures de désespoir, de nausées, et d’essai erreur, le plan a fonctionné. Une chance qu’il était là lui…

Et puis, enfin, cette douche, celle que je rêvais de prendre depuis la matinée, fût la plus jouissante de ma vie. Tandis que l’eau chaude coulait sur ma peau, cette chanson résonnait dans ma tête.

«Hold yourself, howl and scream

Finally feel everything joining underneath.

Forever meant nothing when we had nothing

Feel real

Now»

Daniel Woolhouse, est cet homme qui se cache derrière Deptford Goth. Voix monocorde, ciselée de beats électro minimalistes et d’un soupçon de synthé, la musique de ce Londonien séduit par la nostalgie qu’elle évoque, mais aussi par tous les genres qu’elle entremêles.

Les 12 titres du premier album de Deptford Goth, Life After Defo, paru cette année, sont d’ailleurs le fil conducteur d’une expérience enveloppante, voir même mélancolique. Comme si chaque pièce, s’enlaçaient au fur et à mesure… comme celles d’un casse-tête.

Union porte bien son nom et transperce le cœur, vraiment.

Vous savez quoi? Je n’ai jamais retrouvé mes clés, mais je crois que j’ai trouvé une précieuse pièce de mon casse-tête…

P.S.: Beauté de la vie, je n’ai même pas eu de contravention!

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